La loi du 4 septembre 1942 met en place la réquisition forcée de travailleurs. Les ouvriers du bassin montluçonnais sont directement menacés.

Un premier départ de requis a lieu fin décembre 1942 sans incident notable. Les Jeunesses communistes, les groupements féminins, les socialistes et Libération-Sud, décident de s’opposer à un second départ, 143 requis, prévu pour le 6 janvier 1943. Des tracts et des inscriptions au goudron permettent d’alerter la population.

Le jour dit, il y a foule aux alentours de la gare de Montluçon, entre 2000 et 3000 personnes, surtout des femmes. Des manifestants se couchent sur la voie. D’autres incitent les requis à descendre. Le chauffeur et le mécanicien du train ne veulent pas prendre le risque d’écraser les manifestants et refusent d’obéir aux ordres du chef de gare qui est malmené par la foule. Les cheminots jouent d’ailleurs un rôle notable dans cette manifestation. La police locale, débordée, est relayée par les groupes mobiles de réserve qui menacent de tirer. Deux camions chargés de soldats allemands finissent par arriver de la caserne Richemont (ou Richemond). Ces soldats pénètrent dans la gare baïonnette au canon. La foule se disperse alors rapidement. Le train part avec plusieurs heures de retard, avec à son bord seulement 37 travailleurs sur les 120 requis présents. Beaucoup sont repris le soir-même et doivent se résigner à partir pour l’Allemagne.

Une trentaine de requis ont réussi à s’échapper et se cachent avant de rejoindre le maquis. Parmi eux, il faut citer Louis Bavay (Tilou), un des fondateurs du camp Hoche, un pré-maquis situé sur la commune de Meillard. Pierre Kaan, présent lui aussi lors de la manifestation, trouve refuge à Saint-Sauvier avant de rejoindre Jean Moulin à Lyon.

La BBC, au cours du mois de janvier, fait part de la manifestation de Montluçon qui a donc eu un retentissement mondial. Si on ne peut pas parler d’une réussite éclatante, on peut affirmer sans se tromper que cette manifestation a eu valeur de symbole. Elle n’a d’ailleurs pas été la seule. La manifestation de Montluçon a cela de particulier qu’elle a eu lieu très peu de temps après l’occupation de la zone dite libre par l’armée allemande. Elle se place, de plus, dans une période intermédiaire, entre la loi du 4 septembre 1942 sur la réquisition des travailleurs et celle du 16 février 1943 qui met véritablement en place le Service du travail obligatoire (STO), un recrutement par classe d’âge. 

Un monument commémoratif a été réalisé en 1983 par Yves Girardeau pour rappeler le courage et la détermination des Montluçonnais face aux exigences de l’occupant. La mémoire de ce grand mouvement de protestation populaire du 6 janvier 1943 est rappelée chaque début janvier au cours d’une commémoration officielle. Notre livret sur la manifestation du 6 janvier 1943 et notre exposition de 2020 retracent ce grand moment de l’histoire de la résistance montluçonnaise.